Ihsahn - Das Seelenbrechen Chronique
Ihsahn Das Seelenbrechen
Ihsahn aime le chaos. Le vrai chaos. Une passion qu'il nourrit probablement depuis sa jeunesse au regard de son parcours. Mais vous savez, on vieillit, on mûrit et avec ce projet solo, on aurait pu le croire assagit. Alors pour restaurer cette vision du désordre absolu, il s'est mis à placer les lettres de ces albums n'importe comment. Chaotique quoi. "Eremita" n'était qu'une mise en bouche ; ce nouvel album compte bien franchir un cap. Et que serait le chaos s'il n'était pas évoqué en allemand ? Bim, le norvégien ne reculant devant rien et s'affranchissant de toute règle, il décide de nommer ce cinquième album "Das Seelenbrechen" en lieu et place d'un conventionnel "The Rupture of the Soul" (traduction approximative) pour évoquer "La rupture de l'âme". Enfin je vous dis ça, j'avoue avoir bêtement utilisé Google Traduction, peut-être comme Ihsahn d'ailleurs, pour aboutir à un truc qui peut-être ne veut rien dire. Après tout cela importe peu, du moment qu'on se comprend et que ça sonne bien. Toutefois, le visuel est une chose, mais la musique reste le sujet principal. Et cette fois-ci mes amis, cette fois-ci, de chaos il en est question, quelque chose que vous ne pouviez même pas imaginer, un pari osé qui risque de faire des coupes franches parmi les rangs de ses amateurs.
Le parcours d'Ihsahn s'est toujours fait en douceur, du dernier souffle d'Emperor à "The Adversary" et ce jusqu'à "Eremita", peaufinant années après années, un metal déviant d'un black symphonique vers un metal extrême progressif. En gros, on savait à peu près à quoi s'attendre, laissant à chacun la liberté de trépigner avec plus ou moins d'impatience. Quelque part, c'est rassurant. Donc contraire au chaos. L'homme se devait de réagir pour briser ce déterminisme et redorer son image. Vous l'aurez compris, "Das Seelenbrechen" n'est pas dans la continuité et il y a fort à parier que vous serez dérouté si vous n'êtes pas familier des travaux du couple Tveitan sur les premiers Peccatum ou du projet solo de sa femme, Starofash. Ne vous laissez pas endormir par l'entrée en matière "Hiber" qui s'inscrit comme un prolongement du final de "Eremita", les choses sérieuses commence avec "Regen" et son intro piano/voix (en chant clair évidemment) suivi d'une progression lourde où les hurlements du Norvégien refont surface, soutenue par des claviers hautement épiques et quelques choeurs pour finalement aboutir sur un solo... On reconnait la patte du maître et son génie, un morceau qui aux côtés de "NaCl" et "Pulse" forme ce que l'homme a pu proposer de plus excitant depuis quelques années, entre rock progressif, metal et électro/ambient.
Piste 5, "Tacit 2". Changement de décor, changement d'ambiance, plutôt radical après le calme d'un "Pulse". Le chaos s'illustre à travers un metal/noise des plus déconstruits, cinq minutes de torture sonore érigeant un pont vers une seconde partie d'album plus violente et plus expérimentale encore. Proche d'une BO de survival horror, l'atmosphère se veut froide et oppressante, allant d'un "Tacit" rappelant encore fortement "Eremita" où le saxophone de Munkeby s'intègre à merveille, à un "Rec" déjanté qui n'aurait pas fait tache sur le "Strangling from Within" de Peccatum, en passant par les errances d'un "M" qui explose sur un solo rock prog 70's ou encore les guitares et claviers angoissants de Sub Ater. Le final "See" rejoint "Tacit 2" dans la rupture, encore plus à vif, offrant l'apothéose de la souffrance en guise de conclusion.
Si l'oeuvre est sans doute à prendre comme un tout, "Das Seelenbrechen" propose néanmoins deux parties bien distinctes, une première introvertie et détachée, une seconde sombre et douloureuse. Bien que chacune d'elles se révèle assez convaincante dans son exécution, l'ensemble pâtit de cette si grande hétérogénéité et de cette cassure. On a parfois la sensation d'entendre un patchwork d'idées assemblées sans aucun effort de cohérence, tenant uniquement sur une ambiance qui tente de faire le lien. De plus, même si quelque chose s'en dégage et qu'ils s'intègrent à la progression, des titres comme "See", "Tacit 2" et dans une moindre mesure "M" me laissent perplexes, faisant office pour moi de remplissage. Au bout de ces 49 minutes, on reste un peu sur sa faim... Petite déception donc, surtout que l'on sent ici un Ihsahn en ébullition et désireux d'explorer, de sortir des limites fixées par son début de carrière solo. Malgré toutes ses imperfections, "Das Seelenbrechen" est porteur de nombreuses promesses, un album contrasté et torturé, difficile à digérer de part sa richesse et sa complexité dont la simple existence remet tout en jeu sur l'avenir du projet Ihsahn. Le chaos, le vrai quoi. | Dead 21 Octobre 2013 - 4052 lectures | | DONNEZ VOTRE AVIS Vous devez être enregistré(e) et connecté(e) pour participer. 7 COMMENTAIRE(S) citer | Mon commentaire ci-dessous... et maintenant que je suis enregistré, ma note | citer | Merde mais c'est bien cette connerie ! | citer | The Wanderer 21/10/2013 23:33 | | Humain trop humain est l'un des premiers livres de Nietzsche. En effet on pourrait dire qu'il ouvre les voies de la psychanalyse qui est sur le point de naître.
Contrairement à Dead, j'ai été tout de suite absolument conquis par cet album que je trouve beaucoup plus cohérent que le trop foisonnant et assez indigeste Eremita. Das Seelenbrechen fait vibrer des cordes profondes. La douleur est présente dans la plupart des morceaux et pas seulement dans la dernière partie. L'ouverture Hiber/Regen, c'est du Ihsahn à son top niveau. Il y a plus de voix claire que d'ordinaire mais les passages les plus sereins sont toujours empreints d'une certaine mélancolie ou - Ihsahn sait faire ça parfaitement - de la menace d'une tempête imminente.
Cet album a son identité propre. Malgré ses nombreux contrastes, il montre une grande cohérence d'esprit (pour ne pas dire : d'âme) et de sonorités (comme After et Angl par opposition aux Adversary et Eremita, plus composites). Les orchestrations sont d'une rare finesse. Tacit 2 est sidérant, intensément torturé, et n'est pas sans faire penser à Ordo ad Chao de Mayhem (cette voix déchirée, sur un bourdonnement continu de basse et de batterie aux accents primitifs). A l'opposé, Pulse est d'une douceur infinie. Les deux sont du pur Ihsahn.
Ihsahn se réinvente en avançant, même si on a l'impression que la synthèse est enfin faire entre le projet solo et Peccatum (tant le grandiloquent Stranglin from Within que le sophistiqué In a Reverie). Das Seelenbrechen ne plaira pas à tout le monde. Il parle au fan d'Emperor et Peccatum, ainsi qu'à celui de musique post-punk (Siouxsie and the Banshee, Fields of the Nephilim...) qui sont en moi. Das Seelenbrechen a quelque chose de fondamental, voire d'archétypal : finalement, il fait autant penser à Jung qu'à Nietzche.
Bref, comme je le disais : je suis conquis. | citer | Dead 21/10/2013 22:56 | note: 7/10 | Lol oui pardon, ma femme m'a sorti récemment un truc sur Freud et je suis bloqué sur la psycho... Toutefois, ma remarque précédente s'applique aussi bien à la philo qu'à la psycho, et à bien d'autres sujets | citer | Dead 21/10/2013 20:07 | note: 7/10 | Corneille a écrit : Le choix du titre n'est pas gratuit, il est tiré du livre de Nietzsche, Humain trop Humain et fait référence à l'effet que l'art véritable, authentique, qui n'est ni bon ni mauvais, provoque sur l'âme d'un être sensible et intelligent.
Merci de la précision Corneille. Ma culture en psycho s'arrête à... euh en fait elle n'a jamais commencé | citer | Corneille 21/10/2013 19:53 | | Le choix du titre n'est pas gratuit, il est tiré du livre de Nietzsche, Humain trop Humain et fait référence à l'effet que l'art véritable, authentique, qui n'est ni bon ni mauvais, provoque sur l'âme d'un être sensible et intelligent. | AJOUTER UN COMMENTAIRE | notesChroniqueur : | 7/10 | Lecteurs : | (7) 8.86/10 | Webzines : | (34) 7.69/10 |
plus d'infos sur | Ihsahn Metal extrême progressif - 2005 - Norvège | | |
tracklist01. | Hiber | 02. | Regen | 03. | NaCl | 04. | Pulse | 05. | Tacit 2 | 06. | Tacit | 07. | Rec | 08. | M | 09. | Sub Ater | 10. | See | Durée : 49 min. |
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7 COMMENTAIRE(S)
21/12/2013 13:33
23/10/2013 10:29
21/10/2013 23:33
Contrairement à Dead, j'ai été tout de suite absolument conquis par cet album que je trouve beaucoup plus cohérent que le trop foisonnant et assez indigeste Eremita. Das Seelenbrechen fait vibrer des cordes profondes. La douleur est présente dans la plupart des morceaux et pas seulement dans la dernière partie. L'ouverture Hiber/Regen, c'est du Ihsahn à son top niveau. Il y a plus de voix claire que d'ordinaire mais les passages les plus sereins sont toujours empreints d'une certaine mélancolie ou - Ihsahn sait faire ça parfaitement - de la menace d'une tempête imminente.
Cet album a son identité propre. Malgré ses nombreux contrastes, il montre une grande cohérence d'esprit (pour ne pas dire : d'âme) et de sonorités (comme After et Angl par opposition aux Adversary et Eremita, plus composites). Les orchestrations sont d'une rare finesse. Tacit 2 est sidérant, intensément torturé, et n'est pas sans faire penser à Ordo ad Chao de Mayhem (cette voix déchirée, sur un bourdonnement continu de basse et de batterie aux accents primitifs). A l'opposé, Pulse est d'une douceur infinie. Les deux sont du pur Ihsahn.
Ihsahn se réinvente en avançant, même si on a l'impression que la synthèse est enfin faire entre le projet solo et Peccatum (tant le grandiloquent Stranglin from Within que le sophistiqué In a Reverie). Das Seelenbrechen ne plaira pas à tout le monde. Il parle au fan d'Emperor et Peccatum, ainsi qu'à celui de musique post-punk (Siouxsie and the Banshee, Fields of the Nephilim...) qui sont en moi. Das Seelenbrechen a quelque chose de fondamental, voire d'archétypal : finalement, il fait autant penser à Jung qu'à Nietzche.
Bref, comme je le disais : je suis conquis.
21/10/2013 22:56
21/10/2013 21:03
Merci de la précision Corneille. Ma culture en psycho s'arrête à... euh en fait elle n'a jamais commencé
C'est pas plutôt de la philo?
21/10/2013 20:07
Merci de la précision Corneille. Ma culture en psycho s'arrête à... euh en fait elle n'a jamais commencé
21/10/2013 19:53