Très active depuis le début de sa carrière avec Hulder, dame Marliese Osborne ne semble toujours pas décidée à lever le pied. Un an et demi après
The Eternal Fanfare, sympathique EP qui en ce qui me concerne aura fini par se révéler avec le temps, le one-woman band signait en début d’année son grand retour avec à la clef un deuxième album intitulé
Verses In Oath. Une reprise d’activité effectuée une fois de plus sous les couleurs du label américain 20 Buck Spin et marquée de nouveau par quelques collaborations de l’ombre, la première avec son mari Samuel Osborne (Funebrarum, ex-Bone Sickness, ex-Undergang...) en charge dorénavant de la basse et la seconde avec monsieur Charles Koryn (Ascended Dead, Decrepisy, Negative Prayer, Vrenth...) qui, sans grande surprise, va prendre place quant à lui derrière les fûts.
Ces derniers ayant été embauchés à temps plein, la Belge a donc pu dégager un petit peu de bande passante afin de se charger de l’enregistrement de ces dix nouvelles compositions. Un rôle qu’elle n’avait plus tenu depuis 2018 et la démo
Ascending The Raven Stone. Habituée entre temps à prendre en charge le mixage, elle a confié cette fois-ci cette tâche (ainsi que celle du mastering) au Finlandais Ahti Kortelainen. Un nom qui ne vous dit peut-être pas grand chose mais à qui l’on doit cependant de nombreuses productions pour des groupes comme ...And Oceans, Adramelech, Barathrum, Belial, Demigod, Impaled Nazarene, Moonsorrow, Mordicus, Mythos, Thyrane et j’en passe... Un choix qui ne doit donc absolument rien au hasard puisqu’à l’instar de
The Eternal Fanfare, ce deuxième album se distingue par sa production à la fois conquérante et moderne (et pour le coup un poil plus abrasive) comme pour mieux mettre en exergue l’ambivalence dont fait preuve Hulder à travers sa musique.
Servi par une longue introduction menée par les croassements d’un corbeau particulièrement sonore et bavard,
Verses In Oath n’est pas l’album avec lequel Hulder va rebattre ses cartes et encore moins celles d’une scène Black Metal portée par un respect des traditions souvent synonyme d’un certain immobilisme. Bien au contraire, par son approche souvent directe et frontale et ses atmosphères plutôt baroques que champêtres, celui-ci va s’inscrire comme la suite directe de
The Eternal Fanfare. Ainsi, pas de surprise à ce que le principal atout de ce nouvel album soit une fois encore sa grande variété dynamique avec, malgré un rythme général finalement assez soutenu, de nombreux moments lors desquels Marliese va jouer la retenue. Ainsi, outre "An Elegy" et "Lamentation" qui tout les deux vont donc faire office d’introduction et d’interlude, il convient également de citer "Hearken The End", pièce de plus de sept minutes jouant notamment (mais pas que) sur le caractère répétitif et donc entêtant de certains de ses riffs ainsi que sur la mise en place d’atmosphères chimériques grâce à cette voix d’ange, ces nappes de claviers aristocratiques et cette guitare acoustique discrète dispensée en fin de parcours. À la suite de "Lamentation", cet interlude évoquant par ses voix baroques détraquées l’étrangeté de ces films d’horreur se déroulant dans de grandes maisons victoriennes abandonnées, "An Offering" va renouer avec les atmosphères oniriques de "Hearken The Heart" à l’aide seulement d’un piano, d’un synthétiseur et de percussions sur lesquels Marliese va venir à nouveau poser sa voix angélique. On pourrait également évoquer les deux premières minutes de "Cast Into The Well Of Remembrance" suivies de ce pont acoustique entamé à 3:01, celui de "Enchanted Steel" débuté à 1:27 et suivi à 2:15 par une autre séquence atmosphérique sur fond de voix synthétiques ainsi que d’autres moments suspendus dispensés ici ou là et qui à leur manière vont permettre de rompre avec ces assauts intenses qui vont nous occuper le reste du temps.
Car en dépit de ces instants plus modérés,
Verses In Oath conserve l’intransigeance et le tranchant des premiers enregistrements d’Hulder. Une puissance majestueuse et grandiose que l’on doit, on l’a vu, à cette production taillée pour le job mais aussi à ces attaques conquérantes menées à coups de riffs sinistres, de frappes soutenues (généralement à base de blasts plus ou moins rapides), de nappes de synthétiseurs fantomatiques et/ou baroques ainsi qu’au chant âpre et profond de Marliese qui apporte une touche résolument brutale au Black Metal d’Hulder. Ainsi, de "Boughs Ablaze" à "Hearken The End" en passant par "Verses In Oath", "Cast Into The Well Of Remembrance", "Vessel Of Suffering", "Enchanted Steel" ou "Veil Of Penitence", les moments plus musclés ne manquent pas et constituent peut-être même l’essentiel de ce deuxième album malgré une certaine dualité. Et si l’ensemble manque peut-être de surprise et ne brille pas par son originalité, on ne peut décemment pas reprocher à la jeune femme de manquer de talent et de conviction. Tout chez Hulder transpire la passion et la dévotion à cet art noir. Une musique sincère et habitée qui n’en oublie jamais d’être efficace et pertinente.
Sobre en apparence (à l’image de cette illustration signée Muhamad Candra) mais d’une stature imposante qui force le respect,
Verses In Oath est un album majestueux qui, par son caractère à la fois brutal et en même temps onirique et crépusculaire, en appel à des ressentis contradictoires. D’un coté une approche conquérante et implacable lorsque Marliese marche sur nous avec force et détermination, de l’autre un versant plus doux aux nombreuses évocations romantiques et féminines. Une dualité qui n’a peut-être jamais été aussi prenante que sur ce deuxième album qui, s’il n’a effectivement rien de bien nouveau à offrir, continue cependant d’attester du niveau de ce projet. En effet, sortie après sortie, Marliese Osborne parvient toujours à nous réjouir et à nous enthousiasmer grâce à ce Black Metal épique et racé qu’elle continue de polir chaque jour. Si maintenant cette dernière pouvait nous faire le plaisir de venir jouer en France, on lui en serait gré...
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