Je crois que je n’ai pas été aussi impatient de poser mes oreilles sur un nouvel album de Tribulation depuis la sortie de
The Children Of The Night en 2015. Si on fait les comptes, cela fait donc bientôt dix ans que j’écoute religieusement chaque nouvelle sortie des Suédois en espérant systématiquement retrouver l’enthousiasme d’antan. En vain... Alors je ne vais pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué mais à l’écoute des trois extraits proposés à ce jour, il se pourrait bien que
Sub Rosa In Aeternum me permette enfin de renouer avec ce sentiment. On verra bien... D’ici là, permettez-moi de rattraper mon retard en m’intéressant aujourd’hui à
Hamartia, petit amuse-bouche de vingt-deux minutes paru en avril 2023 chez Century Media Records.
Empruntant son titre à la littérature où, dans une tragédie, l'hamartia évoque :
"cette faute critique qui précipite inévitablement le héros vers sa chute irrémédiable", ce EP de Tribulation se propose de nous faire découvrir quatre morceaux parmi lesquels trois inédits et une reprise des Américains de Blue Öyster Cult. Enregistré par Robert Pehrsson (Death Breath, ex-Runemagick) et Linus Björklund (Lucifer, VOJD, ex-Verminous, ex-Delve), mixé par Tom Dalgety (Ghost, Green Lung, Opeth, Paradise Lost...) avec qui Tribulation avait déjà collaboré par le passé et masterisé par Magnus Lindberg de Cult Of Luna,
Hamartia jouit, vous vous en doutez, d’une production pour le moins soignée à même de restituer les atmosphères noires et gothiques dont les Suédois se sont fait une spécialité. Enfin, après avoir délaissé ses pinceaux et autres crayons depuis la sortie de
The Horror en 2009, Adam Zaars reprend ici du service pour une illustration sobre mais plutôt réussie et qui colle en tout cas parfaitement à la teneur de ces ambiances évoquées plus haut.
Sorti un petit peu plus de deux ans après
Where The Gloom Becomes Sound,
Hamartia est le premier disque de Tribulation sans Jonathan Hultén dans ses rangs. Après avoir quitté le groupe en 2020, celui-ci a effectivement été remplacé dans la foulée par Joseph Tholl (Tyrann, VOJD, ex-Enforcer, ex-Black Trip, ex-Corrupt...). Il s’agit donc ici du premier enregistrement de Joseph avec le groupe et, sans trop vouloir m’avancer, il semblerait bien que Tribulation n’ait pas particulièrement perdu au change...
En effet, si ces trois nouvelles compositions ("Hamartia", "Axis Mundi" et "Hemoclysm") ne sont pas synonymes de grands bouleversements dans l’approche que Tribulation peut avoir de sa musique, je me surprends cependant à en apprécier bien davantage les effets sur ma petite personne. Pourtant, on ne peut pas dire que cela ait été l’amour fou au premier regard. Il a effectivement fallu y revenir longtemps après (d’où cette chronique tardive) pour y trouver le charme que je lui trouve aujourd’hui. Ainsi, sans pour autant renouer avec la flamboyance et la grandeur des compositions qui illuminent les excellents
The Formulas Of Death et
The Children Of The Night, "Hamartia" et "Axis Mundi" vont tout de même parvenir à les tutoyer de pas trop loin... Le premier par son approche dynamique, ses mélodies entêtantes, ses arrangements au piano plutôt soignés, ses ambiances horrifiques et aristocratiques à la fois, ce chant âpre toujours très convaincant et quelques solos particulièrement sympathiques qui effectivement ne devraient pas vous faire regretter le départ du pourtant talentueux Jonathan Hultén. Le second, pour des raisons quasi-similaires même si celui-ci s’avère tout de même un petit peu plus sur la retenue et que les quelques arrangements proposés sont également moins intéressants.
Avec "Hemoclysm", Tribulation va prendre rythmiquement parlant le contre-pied des deux compositions précédentes avec une pièce de près de sept minutes marquée en grande partie par la répétitivité de ses riffs et de ses structures. Une approche beaucoup plus posée et hypnotique (avec toujours ces mêmes ambiances noires et élégantes) contrastée cependant par ces quelques solos mélodiques permettant ainsi de relever l’ensemble avec habileté. Certes, on lui préfèrera « Hamartia » et « Axis Mundi » plus généreux et complets mais ainsi placé dans ce EP celui-ci permet tout de même de varier les plaisirs avant cette chouette reprise de Blue Öyster Cult. Une reprise des plus sympathiques qui va offrir aux Suédois la possibilité de changer de ton puisque "Vengeance (The Pact)", titre tiré de l’album
Fire Of Unknown paru en 1981, laisse effectivement entendre pourquoi il n’est pas rare de voir leurs compatriotes de Ghost comparés au célèbre groupe new-yorkais. En effet, on va retrouver ici ce travail mélodique "simple" mais ô combien entêtant et "tubesque" qui va très vite rendre irrésistible ce genre de composition ainsi que cette théâtralité (notamment dans le chant mais aussi dans sa structure) qui en fait presque un titre d’Opera Rock. Bref, un exercice de style très intéressant puisqu’il permet à Tribulation de sortir de sa zone de confort et d’expression habituelle (à moins qu’il ne soit l’évocation de choses à venir, qui sait...) sans pour autant paraître complètement hors de propos.
Première sortie officielle de Tribulation sans son guitariste lead de toujours,
Hamartia confirme dans un premier temps que le groupe ne s’est pas trompé en embauchant monsieur Joseph Tholl afin de le remplacer. En effet, par ses nombreux solos et autres mélodies dispensés tout au long de ces vingt-deux minutes, il paraît clair que l’ancien Enforcer possède tout le talent et le doigté pour ne pas saper la réputation de Tribulation. Pour ce qui est de son contenu, sans être fondamentalement indispensables, ces quatre titres n’en restent pas moins très convaincants avec un groupe plutôt en forme et des compositions peut-être pas aussi marquantes que celles de
The Formulas Of Death et
The Children Of The Night mais néanmoins particulièrement bien troussées. Bref, vous l’aurez compris,
Hamartia est un EP engageant qui mérite de ne pas être survolé et encore moins ignoré.
1 COMMENTAIRE(S)
23/09/2024 10:10
Ça donne envie pour le nouvel album, qui sort dans quelques semaines.