Ichors Glaive - Solstice Of An Ancient God

Rory Flay, l’infatigable... Partie IV.

À la manière du Suédois Swartadauþuz qui d’ailleurs signe ici cet élégant logo, il est rapidement devenu compliqué de suivre Rory Flay dans toutes ses aventures. Si je vous ai déjà parlé ici de Karghet, Collier d’Ombre et Kveldstimer, il reste encore un petit paquet de projets qui mériteraient de trouver place dans les colonnes de Thrashocore (d’Ablazen Winds à Fervent Diabola en passant par Garmsblod, Ghemhamforash (le prochain sur ma liste) ou bien encore Svarogn, croyez-moi, il y a de quoi faire).

L’entité qui nous intéresse aujourd’hui se nomme Ichors Glaive et est tout comme Kveldstimer la réunion de notre stakhanoviste du jour avec un autre travailleur acharné du nom d’Alex Poole (aka Azeruel Woldaeg). Une collaboration fructueuse puisque les deux hommes partagent aujourd’hui pas moins de quatre groupes en commun. Ensemble et sous le nom d’Ichors Glaive, nos deux protagonistes ont sorti en juillet 2024 une première démo intitulée Solstice Of An Ancient God. Celle-ci, parue dans un premier temps au format cassette chez Blud Auk Tapes, devrait normalement bénéficier dans les prochains mois d’un pressage vinyle grâce au concours du label américain Final Agony Records.

Malgré la multitude de projets dans lesquels monsieur Flay est aujourd’hui embarqué, celui-ci ne semble pas avoir particulièrement envie d’explorer de nouveaux horizons. Ainsi, comme le suggèrent d’ailleurs cette illustration mystérieuse et inquiétante, ce logo sans équivoque ou cette typographie gothique, Ichors Glaive s’adonne sans grande surprise à la pratique d’un Black Metal dépouillé qui une fois encore doit beaucoup à la scène norvégienne des années 90. De cette production sommaire et lointaine (sans être pour autant un frein à l’immersion de l’auditeur) à ces riffs sombres et décharnés en passant par ces mélodies glacées et sinistres, cette batterie hypnotique et ces hurlements déchirants, on trouve tout au long de ces trente-quatre minutes tout ce qui fait dans les grandes lignes le charme des premiers albums de Darkthrone, Burzum, Satyricon, Gorgoroth et autre Ulver. Une vision passéiste fidèle à une esthétique visuelle et sonore laissant bien évidemment peu de place à la nouveauté et à l’expérimentation même si les Américains évitent tout de même l’écueil de la simple copie.

En effet, avec Ichors Glaive, Rory Flay et Alex Poole ont fait le choix de compositions généreuses dont la durée oscille entre sept et dix minutes. Des titres au long cours plutôt dynamiques puisqu’une grande majorité des parties de batterie de monsieur Poole se font sur la base de blasts tranquilles et entêtants et qu’elles sont elles-mêmes soutenues par des riffs sobres et tout aussi hypnotiques. Cependant, même si cette première démo est effectivement constituée en grande majorité de longues séquences capables d’amener l’auditeur à s’élever dans un état quasi-transcendantal, il est précieux de constater que le duo est également capable d’apporter un petit peu de nuance et de contraste à sa formule. Cela va ainsi se jouer en premier lieu par le biais de quelques changements de rythmes permettant de rompre de manière significative avec le côté entêtant de ces fameuses parties évoquées plus haut (la première minute d'"Ablazen Reliquary" puis plus loin à compter de 3:35, "Solstice Of An Ancient God (Primordial Wisdom)" à 2:26 et 3:26 ou lors de ces instants instrumentaux plus atmosphériques comme sur les dernières secondes de "Their Might To Be Written By The Stars" ou les deux/trois dernières minutes de "Solstice Of An Ancient God (Primordial Wisdom)"). L’autre élément qui permet à Ichors Glaive d’amener un peu de contraste à son Black Metal est l’usage de ce chant plus théâtral aux atours religieux évidents ("Adorned By The Fallen" à 3:28, "Ablazen Reliquary" à 4:06, "Solstice Of An Ancient God (Primordial Wisdom)" à 5:38). Se faisant, Rory Flay amène au Black Metal du duo quelque chose de lumineux et d’un petit peu plus atmosphérique encore, un petit peu à la manière de ce que les Norvégiens de Vemod (ceux originaires de Namsos et pas de Trondheim) ont pu proposer par le passé, notamment avec l’excellent Venter På Stormene.

À l’instar de ses autres projets, Ichors Glaive est une fois encore la preuve que tout ce que touche Rory Flay est effectivement digne d’intérêt. Il est certain qu’avec une telle démo le duo ne révolutionnera absolument rien mais qui en 2025 attend encore qu’un groupe le fasse ? Certainement pas moi. De fait, si vous avez une quelconque appétence pour la musique des groupes évoqués dans cette chronique et de manière plus générale pour le Black Metal norvégien froid et lancinant, jeter une oreille attentive à Solstice Of An Ancient God sera probablement votre meilleure idée de la journée. Me concernant, je continue à croiser les doigts pour un pressage vinyle plus à même de rendre justice et à cette illustration et son chouette logo et à ces quatre compositions fort convaincantes.

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