Si vous êtes là aujourd’hui à lire les lignes qui se dessinent sous vos yeux c’est probablement parce que vous êtes déjà bien au fait de qui sont les gens qui se cachent derrière Corpus Offal et qu’une part de vous, malgré l’excitation de retrouver ces « jeunes » texans, continue de pleurer la disparition tragique et pour le moins inattendue des excellents Cerebral Rot... Pour autant, même si le groupe de Seattle bouffe effectivement les pissenlits par la racine depuis déjà un petit moment, l’aventure se poursuit ici pour deux de ses anciens membres bien décidés à ne pas s’apitoyer sur le passé. Un an jour pour jour moins un jour (soit 364 jours) après la sortie de sa première démo parue le 22 mars 2024, les Américains de Corpus Offal signent ainsi leur grand retour avec à cette occasion un premier album éponyme paru naturellement sous les couleurs du label 20 Buck Spin.
Si l’effectif de Corpus Offal n’a pas bougé d’un iota, il n’en est pas tout à fait de même côté production puisque pour enregistrer et produire ces sept morceaux (parmi lesquels deux versions réarrangées de "Ripened Psychosis" et "Gorging Gastric Decedent" déjà présents sur la première démo des Américains), le groupe a fait appel cette fois-ci aux services du célèbre producteur Billy Anderson (Neurosis, Sleep, Brutal Truth, Buzzov•en, Fantômas, Bell Witch, Agalloch...). Et si Dan Lowndes signe une fois de plus le mastering, Ian Schwab (chant, guitare) a laissé cette fois-ci l’illustration à la charge de madame Karina Monzon dont les oeuvres aussi cool que repoussantes ornent déjà certaines sorties de Cerebral Rot (tiens donc), Disembowel ou Mortal Wound.
Un an après sa première démo, rien n’a évidemment changé du côté de Corpus Offal qui sur ce premier album affiché à près de cinquante minutes va naturellement renouer avec ce Death Metal putride et groovy qui faisait déjà le sel des méfaits de Cerebral Rot quelques années auparavant. Cependant, comme pressenti à la découverte des deux titres figurant sur cette fameuse
Demo 2024, les Américains ont choisi d’aborder les choses un petit peu différemment en allongeant notamment la durée de leurs compositions. Dans le cadre de ce premier album et à l’exception d’un "(Into) Purging Creation" faisant office d’introduction torchée en un petit peu plus d’une minute, tous les autres morceaux oscillent ici entre six et douze minutes. S’il en faut évidemment beaucoup plus pour effrayer l’amateur de Death Metal un tant soit peu éclairé, ce genre de durées allongées est tout de même assez révélateur des ambitions nouvelles de Corpus Offal, notamment en matière d’atmosphères pesantes et faisandées. Il n’est donc pas rare (mais pas systématique non plus) de constater que les Américains prennent un malin plaisir à lever le pied et ainsi changer de braquet au profit de séquences plombées auréolées comme toujours de ces leads mélodiques absolument sinistres et pourtant si délicieux. Que ce soit "Spinous Forms Of Mortal Abhorrence", "Corpus Offal", "Gorging Gastric Decedent", "Ripened Psychosis" ou "Secreted Effluence (Spilling)", chacune de ces compositions possède son ou ses passages rythmiquement plus modérés (pour ne pas dire plombés) grâce auxquels Corpus Offal va rendre l’atmosphère encore un petit peu plus suffocante et nauséabonde.
Des instants permettant comme toujours d’insuffler ce qu’il faut de contrastes et de nuances à une musique qui sans être particulièrement brutale offre tout de même son lot de séquences taillées pour se taper la tête contre les murs et se chauffer les cervicales tel un demeuré particulièrement imbibé. Outre quelques coups de boutoirs et autres démonstrations de force dispensés sur chaque titre (ou presque) sous la forme de courtes rasades de (semi) blasts, les Texans sont également très friands de cavalcades thrashisantes comme en attestent tous ces passages particulièrement entrainants entendus sur "Spinous Forms Of Mortal Abhorrence" à 2:09, "Essence Of Dissolution" à 2:41, "Corpus Offal" à 4:41, "Gorging Gastric Decedent" à 0:44 ou "Secreted Effluence (Spilling)" à 2:18... Mais aussi cool et efficaces que soient tous ces passages (et croyez moi, ils le sont vraiment), c’est leur association avec ces séquences chaloupées idéales pour se dandiner avec grâce ("Spinous Forms Of Mortal Abhorrence" à 1:35, 3:32, les premières mais aussi dernières mesures de "Essence Of Dissolution", "Corpus Offal" à 0:35 et 6:02, "Gorging Gastric Decedent" à 1:28, "Ripened Psychosis" à 4:05) et bien entendu tous ces riffs biscornus, ainsi que ces leads et autres solos faisandés dont l’ADN finlandais ne fait absolument aucun doute ("Spinous Forms Of Mortal Abhorrence » à 5:43, "Corpus Offal" à 2:10, 2:54 et 6:01, "Gorging Gastric Decedent" à 1:50 et 4:29, "Ripened Psychosis" à 3:22 et 6:05, "Secreted Effluence (Spilling)" à 1:10, 4:18 et 7:09) qui à la manière de Cerebral Rot font là encore tout le charme de Corpus Offal.
Évidemment très attendu au tournant après cette excellente première démo, Corpus Offal vient confirmer avec ce premier album que la disparition inattendue de Cerebral Rot n’est pas nécessairement une tragédie (même si on ne peut que regretter la fin inopinée de ses activités) puisque ce que nous propose aujourd’hui le groupe texan en est la continuité directe. En effet, on retrouve tout au long de ces quarante-neuf minutes l’essence même de ce groupe défunt à commencer par ce riffing assez personnel ainsi que tous ces leads et autres solos déglingués et fétides qui participent grandement au climat résolument sinistre dans lequel trempe chacune de ces sept compositions. La différence, on l’a vu, tient dans le fait que Corpus Offal a choisi d’allonger mais aussi d’alourdir quelque peu son propos à l’aide de séquences plus écrasantes qui vont permettre aux Américains d’amener encore un petit peu plus de nuances à son Death Metal rance et putride. Finalement, même si comme beaucoup d’entre vous j’étais évidemment chafouin en apprenant que Cerebral Rot avait mis fin à ses activités alors qu’il était pourtant si bien lancé, il faut se rendre à l’évidence que Ian Schwab et Clyde Lindstrom ont su parfaitement s’entourer et surtout inscrire ce nouveau projet dans une certaine continuité permettant de voir en Corpus Offal la suite presque directe. Bref, ce premier album est comme on pouvait l’escompter une franche réussite. Un disque qui dégouline de groove, de riffs et de leads étranges, d’attaques soudaines et jubilatoires et d’atmosphères viciées et sournoises. Un régal en somme...
2 COMMENTAIRE(S)
28/03/2025 16:22
Les premiers morceaux écoutés m'ont bien donné envie. Les compositions sont plus complexes que Cerebral rot, on sent l'évolution dans la continuité pour les compères Schwab et Lindstrom comme tu l'écris.
La pochette n'est pas trop à mon gout par contre... Achat obligatoire néanmoins!
21/03/2025 13:34