Deadguy - Screamin' With The Deadguy Quintet
Chronique
Deadguy Screamin' With The Deadguy Quintet (EP)
Si on a tendance à croire qu’il suffit de sortir un album largement encensé par les critiques et le public pour que tout aille pour le mieux, la vérité est souvent bien plus complexe et surtout nettement moins idyllique. Un fait que les Américains de Deadguy ont malheureusement appris à leurs dépens puisque quelques mois après la sortie de l’excellent Fixation On A Co-Worker plébiscité de toute part, le groupe va devoir faire face à de sérieuses tensions et à des changements d’effectifs qui malheureusement lui seront fatal. En effet, à l’issue d’une tournée américaine humainement compliquée, Tim Singer (chant) et Keith Huckins (guitare) prennent la décision de quitter le navire, de déménager à Seattle et de former dans la foulée avec la collaboration de quelques nouveaux compagnons un groupe baptisé Kiss It Goodbye, autre figure emblématique de ce que l’on appelait à l’époque le Hardcore Chaotique. Genoux à terre mais toujours en vie, c’est le souffle court que nos trois rescapés (Tim Naumann, Chris Corvino et Dave Rosenberg) choisissent de poursuivre l’aventure. Pour ce faire, Deadguy décide de faire passer Tim Naumann derrière le micro, d’embaucher Tom Yak à la seconde guitare et James Baglino à la basse. Un line-up qui fera illusion le temps d’un EP intitulé Screamin' With The Deadguy Quintet mais qui finira malheureusement par péricliter quelques mois plus tard puisqu’en 1997 les Américains mettront effectivement un terme à leurs activités.
Sorti chez Victory Records, cet ultime EP (enfin pas tout à fait puisque le groupe qui a repris du service en 2021 s’apprête tout de même à sortir un nouvel album sur Relapse que j’attends évidemment de pied ferme) est notamment passé entre les mains de Steve Austin a qui a été confié la production. Un choix qui n’a évidemment rien d’anodin puisque depuis 1992 celui-ci s’évertue également de son côté à faire beaucoup de bruit en compagnie des excellents Today Is The Day. À cette occasion, notre fidèle adhérent à la N.R.A. (National Riffle Association) nous offre une production sèche et dépouillée tout à fait idéale pour ce genre de Hardcore écorché et bruyant que nous livre une fois de plus Deadguy.
Bouclé en moins d’un quart d’heure, Screamin' With The Deadguy Quintet se compose de cinq / six nouveaux morceaux (selon le format choisi) qui suivent évidemment le chemin tracé par le groupe depuis sa formation en 1994. Seulement voilà, perdre son charismatique chanteur et l’un des guitaristes les plus emblématiques du genre n’est évidemment pas sans incidence. Malgré la qualité indéniable de ce EP, quelques secondes suffisent tout de même pour constater que l’on n’est plus tout à fait au niveau d’un Fixation On A Co-Worker. Pour commencer, le chant de Tim Naumann ne possède ni la tension ni l’ambivalence de son prédécesseur. Certes, ses hurlements arrachés ne sont pas sans faire effet mais le manque de variété de ces derniers (exit ces vocalises façon spoken word et autres passages de psychopathe qui se parle à lui-même) et le manque de tension extrême dans le chant font qu’effectivement on perd un petit peu au change... Même chose du côté des riffs puisque Chris Corvino et Tom Yak, sans démériter, n’ont pas tout à fait le talent de monsieur Keith Huckins. Résultat des courses, si cette fois-ci le riffing ne perd pas spécialement en tension celui-ci n’a cependant plus tout à fait la même saveur. Plus Noise que Metal là où l’ancien Rorschach parvenait à un parfait équilibre entre les deux, l’approche des deux hommes fait effectivement perdre un petit peu de ce qui jusque-là participait à la puissance de feu, à l’abrasivité et donc au charme de Deadguy. Rien de vraiment rédhibitoire mais difficile néanmoins de ne pas le percevoir.
Malgré tout, comme je le disais plus haut, Screamin' With The Deadguy Quintet n’est pas un mauvais EP, loin de là. À la manière des précédents enregistrements du groupe, ce Deadguy quelque peu chamboulé conserve cette dynamique chaotique avec des morceaux toujours assez courts (seuls "Angry Dwarf" et "Prosthetic Head" dépassent les trois minutes) et son approche toujours très nerveuse. De ces riffs dissonants et parfois même désaccordés à cette batterie épileptique et imprévisible en passant par cette basse ultra saturée, ce mélange de séquences abrasives et de passages beaucoup plus lourds sans oublier évidemment ces vocalises arrachées, l’essentiel de ce qui caractérisait la musique de Deadguy jusque-là n’a donc pas quitté le navire et continue d’opérer avec encore pas mal de charme et d’efficacité même si, on l’a vu, le groupe a tout de même perdu un petit peu de sa superbe.
En effet, qu’on le veuille ou non, le départ de Tim Singer et de Keith Huckins n’a pas été sans incidence sur la musique des Américains. Pour autant, Deadguy s’en sort encore ici très bien et de fait ces deux absences ne doivent en aucun cas vous faire considérer Screamin' With The Deadguy Quintet comme un EP indigne d’intérêt. Car même si le groupe a effectivement perdu un peu de sa superbe, il n’en reste pas moins à l’époque et encore aujourd’hui une valeur sûre qui si elle n’a jamais eu le succès de formations telles que Converge, Botch, Coalesce et compagnie a pourtant largement contribué à l’essor de ce genre de Hardcore chaotique. Bref, je vous invite encore une fois à y jeter une oreille attentive surtout si ce genre de formations résonne ou à un jour résonné chez vous et cela d'autant plus que le prochain album attendu pour le mois prochain et qui marquera le retour de Deadguy après trente ans d'absence risque bien d'imposer les Américains dans le paysage musical de 2025.
| AxGxB 9 Mai 2025 - 400 lectures |
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