Cette pochette de «
To Any World Beyond the Tomb »… Depuis la première fois que je l’ai vue, je cultive des sentiments extrêmement ambivalents à son égard. Un coup je la trouve vraiment trop
kitch, un coup je la trouve incroyablement
cool, une fois je ricane bêtement, une fois elle m’émoustille, elle me désole, elle me surprend, elle est unique en son genre, c’est indéniable… Et, quelque part, l’objectif est atteint puisqu’elle marque les esprits, avec, entre autres, un magnifique travail sur la couleur et les contrastes. Le choix était donc osé de confier l’habillage de l’album à la photographe
Emmanuella Zachariou mais pour avoir regardé sur son Instagram les clichés pris au cours de cette séance de
shooting, le résultat final est en définitive hyper sympa, c’est une audace visuelle qu’il fallait prendre pour ce premier LP dont les ambitions ne s’arrêtent pas à la simple esthétique.
SOMBRETOUR est donc une nouvelle formation de
doom death metal parisienne, le projet d’un seul compositeur :
Jérémie V. Griseval (ou
Jérémie Goyet, j’ai trouvé les deux noms). Présenté ainsi il n’y a pas de quoi s’agiter, un
one-man band supplémentaire dans le panorama, voilà tout… Mais là où on va sérieusement pouvoir commencer à tiquer, c’est lorsque nous découvrons qui tient la batterie de ce projet (du moins sur ce LP).
Hannes Grossmann cela vous parle ?
ALKALOID,
BLOTTED SCIENCE,
HATE ETERNAL,
NECROPHAGIST,
OBSCURA, c’est bon ? Tout le monde le remet ? Je voudrais taquiner d’entrée de jeu, j’ajouterais immédiatement que ce n’était vraiment pas la peine de solliciter ce
Kaiju de la sulfateuse pour jouer ce que j’entends. Je dis cela sans penser à mal, mais j’y reviendrai. Ensuite, afin d’assurer les vocaux extrêmes, nous retrouvons
Topias Jokipii de l’estimé
CHESTCRUSH (entre autres) et moi, lorsque je lis ces deux noms, je souille abondamment mon Eminence.
Sauf que l’homme aux manettes du groupe, il a plutôt des ambitions mélodiques et que son plomb, il le mélange plus que de raison à de la plume. Autrement dit, les fondements
doom death ne doivent ici être compris que comme un terreau fertile sur lequel de nombreuses autres influences vont venir se greffer, beaucoup (voire toutes) ne relevant en aucun cas du domaine du
metal. Ainsi, le morceau éponyme qui ouvre l’album n’est en rien représentatif du reste car quasiment le seul dans une veine purement rugueuse. J’avoue toutefois que c’est plutôt une réussite sachant que nous sommes sur une chanson de sept minutes. Idem concernant les cinq pistes suivantes, je n’ai pas grand-chose à redire dès lors que la musique te tape un peu dans le fond, déjà parce que nous connaissons la valeur du vocaliste, que le batteur est d’un professionnalisme absolu et que
Jérémie s’en sort très bien tout seul avec les autres instruments. Alors, qu’est-ce qui cloche ? Ou plutôt, est-ce que ça cloche ?
Disons qu’il y a un peu de tout dans ce disque, peut-être trop pour sa faible durée (trente-cinq minutes). Nous y entendrons énormément de passages
shoegaze, avec comme références énoncées
ALCEST bien entendu, mais également de façon plus surprenante (car plus rare dans ce milieu),
SLOWDIVE. Il y aura également de nombreux moments acoustiques, je pense alors davantage à
ANATHEMA (celui des années 2010). La conséquence immédiate de ces alternances de climats, c’est que ce super batteur dont tout le monde rêve, il est méconnaissable. Forcément, et encore je ne détaille pas tous les albums sur lesquels il a joué (il y a
« Epitaph » dedans,
« Upon Desolate Sands » également) mais solliciter un tel monstre pour plaquer des tempos élémentaires, je trouve cela fou. Bon, j’exagère peut-être un poil… Je n’ai sans doute pas l’oreille suffisamment exercée pour saisir les subtilités, les finesses de son jeu, c’est fort possible. Je comprends le principe de musicien de studio, ce n’est pas la question, mais il y avait mille batteurs possibles pour assurer la rythmique de «
To Any World Beyond the Tomb », alors pourquoi ce choix ? Il ne s’embête pas légèrement en interprétant « Remembrance Never Dies » par exemple ?
Concernant le chant extrême, c’est peut-être différent mais si tu as déjà écouté
CHESTCRUSH, le groupe est tellement vénère que les vocalises dont est capable le
frontman me semblent sous exploitées dans ce projet ambitieux mais dont la démesure du
line-up m’interroge. Maintenant, il faudrait que je parvienne à faire fi de ces informations afin de prendre le disque pour ce qu’il est : le premier LP d’un musicien (compositeur et interprète) qui se lance dans le
doom death. Essayons…
L’
artwork, j’en ai déjà parlé, c’est original, réussi, il y a tout de suite un univers graphique qui se crée autour de
SOMBRETOUR. La production assurée par
Spencer Moris est elle aussi en tous points impeccable : claire, puissante quand il le faut et parvenant à faire logiquement coexister les oxymores musicaux qui construisent les titres. Ensuite, il y a les qualités indiscutables des instrumentistes : j’ai beau pleurnicher parce que monsieur
Grossmann ne m’atomise pas la tronche qu’il effectue pour autant une performance au rabais. Les vocaux, surtout les extrêmes, apportent du cachet quel que soit le registre (tantôt
death tantôt
black) et si je ne suis que peu friand des voix claires typiques du style
shoegaze, elles sont justes, sans accent gênant, c’est déjà beaucoup l’air de rien. Enfin, si je ne devais retenir que les parties
doom de l’album, alors je n’aurais que des louanges à faire car c’est fin, c’est intelligent, c’est mystérieux. En revanche, je suis vraiment moins client des à-côtés extra-métalliques, non pas parce que je suis obtus, juste parce qu’ils me semblent dénaturer ce qu’il y a de meilleur chez
SOMBRETOUR : son
doom death sobre, classieux. Le reste permet certes de jouer avec les étiquettes, cela reste un bien maigre bénéfice.
Quoi qu’il en soit, nous pouvons nous réjouir de l’arrivée de ce nouveau nom au sein de la scène extrême française car il apporte tout de même un peu de sang neuf, comme
CONTEMPLATION bien que dans un registre différent, ce qui est toujours le signe d’une scène vivante en quête de nouveaux horizons. De mon côté, j’en resterai là pour le moment, néanmoins curieux de connaître la suite car ce compositeur est malin, je suis sûr qu’il nous réserve encore de belles surprises.
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