Je ne sais pas vraiment à qui l’on peut attribuer la paternité / maternité du genre
black shoegaze, nous avons en France d’excellents représentants (
ALCEST,
LES DISCRETS,
AMESOEURS, etc.) et, partout dans le monde, le romantisme de cette musique continue de pousser de jeunes musiciens dans cette voie. Avec «
The Offering », premier album de
SYLVANSHINE, nous prenons la route de la Roumanie pour y rencontrer
Ion Ureche, l’homme derrière le groupe, seul en charge des voix ainsi que de l’instrumentation. Il va même plus loin dans le « fait maison » puisqu’il s’occupe également de l’enregistrement, de la production, du mixage et du
mastering. Je sais bien que selon l’adage, on n’est jamais mieux servi que par soi-même (ce qui est souvent faux pour la cuisine, souvent vrai pour la masturbation), mais à la découverte du résultat, il faut bien admettre que cet artiste a réalisé un travail impeccable.
Avec trois titres instrumentaux et, globalement, pas mal de guitares acoustiques, vous aurez déjà saisi que nous ne sommes pas dans la branche la plus dure du style, tout
post soit-il. L’homme apprécie les climats bucoliques, la douce mélancolie du chant des oiseaux («
Dans un monde sans mélancolie, les rossignols se mettraient à roter » - Cioran, « Syllogismes de l’amertume »), même la dimension
black metal, tout de même présente, prend des intonations de
spleen profond que le chant, étonnement viril, ne fait que paradoxalement renforcer. Alors j’écris « étonnamment viril » non pas pour laisser à penser que comme c’est du
shoegaze je m’attendais à une voix plus… Bordel comment je vais me sortir de cette impasse ? Disons que les vocalistes de cette mouvance font souvent des pleurnicheries alors qu’en l’occurrence, ici, les tonalités sonnent quasiment
raw, virulentes, agressives, elles détonnent avec les atmosphères instaurées par les instruments, que ce soit en clair ou dans la distorsion.
Un autre point que j’apprécie est que
SYLVANSHINE sait varier les intentions et les durées. « Dispossession » par exemple, avec son démarrage d’une grande puissance évocatrice sera contrebalancée par la subtilité plus féminine d’autres compositions, ces alternances d’intensité rendant l’album intéressant de bout en bout, si tant est que l’on ne soit pas allergique à cette veine musicale. De plus, en intégrant des pièces plutôt brèves (trois à quatre minutes) avec d’autres plus développées (cinq à sept minutes),
Ion démontre qu’il n’est pas enfermé dans un moule, une façon inamovible de structurer ses idées, d’autant que chacune des compositions fonctionne telle une narration dotée de sa progression propre, avec ses acmés, ses essoufflements, ses forces et ses failles.
Quoi qu’il en soit, ne perdons pas de vue qu’il ne s’agit que d’un premier album, à peine précédé d’un EP («
The Wanderer »), et que nous sommes donc en droit de penser que la marge de progression de cette nouvelle formation est encore énorme. Pourtant, pour un début, le résultat est plus que concluant, à la fois beau, sincère, jamais caricatural ou maniéré et même si c’est loin d’être ma musique de prédilection, je chérirai cet album dans un petit coin chaud de ma cervelle, une place aux côtés d’«
Écailles de lune » et de «
Septembre et ses dernières pensées ».
2 COMMENTAIRE(S)
20/06/2025 09:08
Pas mieux, tu t'es lâché dis donc !
19/06/2025 22:27