Lilim - Weighted Ghosts
Chronique
Lilim Weighted Ghosts
C’est toujours étrange de s’essayer à naviguer dans des territoires assez inconnus, ou bien encore non défrichés, mais parfois il est bon de se mouvoir hors des sentiers battus et de sa petite zone de confort. Rien ne semblait pouvoir faire en sorte que votre humble serviteur puisse faire la rencontre de Lilim, formation canadienne qui propose ici son deuxième album intitulé Weighted Ghosts, si ce n’est des hashtags qui m’on fait cliquer dessus il y a quelques semaines et lâcher quelques deniers pour cette réalisation autoproduite, et dont tous les gains sont d’ailleurs reversés à une association, voilà le type d’activisme dans lequel le groupe s’engage. Et grand bien m’en a fait car cet album pourrait intéresser bien au-delà des seuls amateurs de hardcore, dont je m’excuse par avance de mes références de néophytes - for serpents eve.
Violence, rage, aigreur, mettre à bat le patriarcat, ne plus se laisser dominées, remettre en question tout un système: c’est tout cela qui vient à l’esprit en écoutant ce Weighted Ghosts. L’on n’est pas vraiment là pour rire mais bien pour mettre en musique toutes ses frustrations et toute sa colère, et cette manière de dénoncer les tares de ce monde qui ne va plus bien. C’est certainement cliché eût égard au spectre musical dans lequel évolue Lilim, mais c’est bien quelque chose que l’on ressent tout le long de ces huit titres qui défilent sans temps morts, il suffit de voir la durée globale de l’album. Et il y a bien quelque chose de menaçant qui sourde à l’écoute de cette seconde réalisation des Canadiens de Lilim, comme autant de détonations et d’attaques en règle de tout un système. Évidemment, vu le genre pratiqué, l’on ne pourrait pas en attendre moins de la part du quatuor, mais pourtant il y a quelque chose qui rend cette réalisation attachante: c’est surtout sa puissance et son efficacité qu’il faut mettre en avant. En premier lieu, et c’est ce qui m’a bien plu, c’est que le quatuor est très loin de s’ébaudir dans un certain monolithisme musical puisque nous sommes à la croisée des chemins entre hardcore et d’autres éléments bien plus métalliques.
C’est d’ailleurs la grosse évolution par rapport au premier album éponyme, où si l’on retrouvait quelques courts passages plombés, l’on a ici une certaine lourdeur, surtout quand le groupe ralentit de temps à autres le tempo, je pense notamment à l’introduction de Waving to Wolves qui lance très bien les hostilités, au même titre que certains breaks. Et dans cette lourdeur assumée, il y a ce son de basse divinement saturée et incroyablement chaud qui me plait évidemment beaucoup, mais toute la production rend clairement justice au propos du groupe. Surtout il y a tout autant de passages hardcore classiques, si je puis dire, d’autres un peu plus mélodiques et qui me rappellent Converge dans cette mise en avant de ce côté mélodique, notamment sur Bloodlet quand la guitare part seule en lead mettant tout autant en avant la basse, avec aussi quelques mosh parts comme sur Free the Topiary, ou bien encore quelques instants qui me renvoient aux deux premiers Neurosis, avec toute cette urgence que l’on attend bien dans ce registre. Et puis, au détour d’un riff, l’on retrouve parfois un trémolo proche du black metal, ou bien des passages en blast beats assez régulièrement, comme pour bien noter cette assimilation d’influences diverses.
Mais n’allez pas croire que l’ensemble passe du coq à l’âne sans réelle réflexion quant à ses effets, c’est vraiment bien pensé et cela reste clairement et rondement efficace. Certes l’ensemble est indubitablement agressif, mais l’on sait aussi calmer le jeu pour t’enfoncer encore plus bas, avant de repartir dans quelque chose de plus frénétique. Tout concourt au fait que l’ensemble n’est nullement lassant. Mais je trouve que c’est souvent cette juxtaposition d’éléments un peu idoines qui mettent encore plus en valeur tous les moments intenses que comprend cet album, je pense notamment à ce passage plus lent sur Upchuck qui ne perd rien en intensité avant que tout ne redémarre de plus belle. Et puis, ce qu’il y a de très plaisant avec ce disque, c’est qu’il y a aussi une grosse influence de la scène alternative des années quatre vingt dix, que ce soient les incursions dans le domaine du noise rock, que cette vibe qui nous renvoie au mouvement riot grrrl. Il y a ainsi de nombreux passages, de même que le chant de Kirsten White, qui me font penser à pas mal de ce groupes du début des années quatre vingt dix, L7 en tête. Elle mène d’ailleurs très bien la danse avec un engagement sans faille et sans aucun angélisme: la parfaite frontwoman si je puis dire.
Voilà tout ce qui fait l’intérêt de ce Weighted Ghosts: un savant mélange d’agression sonore et d’efficacité sur un peu plus de vingt trois minutes. Évidemment, j’aurais bien aimé en avoir un peu plus, mais au moins l’on n’a pas de baisse d’intensité sur cet album et il est suffisamment diversifié pour ne pas perdre en impact avec le temps, ou en tout cas pour m’ennuyer, ce qui est souvent le cas dans ce registre musical qui ne me parle pas forcément. La marche de progression entre le premier essai et celui-ci est assez flagrante et l’on espère que le quatuor sortira assez rapidement d’un certain anonymat pour diffuser plus massivement aussi bien sa musique que son message. Et surtout que le groupe continue dans cette veine car il a de quoi se démarquer aisément au sein de cette scène.
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